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Dans sa réunion du 5 mars 2003, la commission a entendu M. Louis Stephany, Doctor of chiropractice. Il s’est dégagé des explications de l’expert que la chiropractie est une profession qui a pour objet le recouvrement et le maintien de la santé humaine ainsi que le diagnostic, le traitement et la prévention de ses déficiences en concentrant son intervention sur l’intégrité du système nerveux, en relation avec tous les autres systèmes du corps humain, sains ou malades, en portant une attention particulière à la colonne vertébrale.
En tant que professionnel de santé, le chiropraticien considère l’être humain dans sa globalité et tient compte de ses pouvoirs naturels de récupération. Il ne recourt ni aux médicaments ni à la chirurgie.
En ce qui concerne le volet très important de la formation et du cycle d’études autorisant à exercer la chiropractie, l’expert explique qu’il est strictement illusoire de faire croire que l’on puisse apprendre la chiropractie sous forme de stages comme le font certains kinésithérapeutes, de séminaires ou par correspondance. Dans ce contexte il se prononce fermement contre toute forme de charlatanisme. Les chiropraticiens en droit de porter ce titre sont titulaires d’un diplôme de Doctor of chiropratice (D. C.) obtenu dans des écoles accréditées par le Chiropractic Council on Education (CCE) et European
Chiropractic Council on Education pour l’Europe (ECEE).
Le diplôme de Doctor of chiropractice est délivré aux étudiants ayant suivi un cursus de formation universitaire de 6 années à temps plein après le baccalauréat (7 ou 8 ans d’études aux Etats-Unis). La plupart des écoles se trouvent aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne.
Le dossier constitué par M. Louis Stephany comporte une documentation très exhaustive sur la formation académique en chiropractie en Grande-Bretagne et la législation y relative (chiropracticors Act 1994). Il conclut qu’aujourd’hui le docteur en chiropractie a un bagage académique quasi analogue à celui de médecin (à part la pharmacologie et la petite chirurgie), et ce également en heures de formation ce qui lui permet de poser un diagnostic et d’exercer sa profession dans les limites de sa discipline d’une façon tout à fait indépendante.
M. Louis Stephany souligne le fait que l’exercice compétent de la chiropractie présuppose une formation de haut niveau. Cette exigence de formation constitue un critère de sélection qui a produit un nombre plus restreint de chiropraticiens et a laissé une lacune ouverte à la prolifération de manipulateurs plus ou moins formés et qui, n’ayant donc pas fait d’études chiropratiques, s’appellent généralement des ostéopathes et ce à l’encontre des „Medical doctor“ ostéopathes américains ou de ceux qui ont accompli leurs études à temps plein par exemple à l’Ecole d’Ostéopathie de Londres.
Certes, si les ostéopathes sont plus présents dans les médias, cette présence s’explique sans doute plus de par leur nombre que de par leur bagage académique.
Légiférer en cette matière semble nécessaire pour, d’une part, protéger la santé du patient et, d’autre part, pour la protection légale du titre professionnel du chiropraticien. La qualité de la formation ainsi que le nombre d’heures de cours devraient constituer un critère de sélection.
Au cours de son exposé, l’expert M. Louis Stephany expose un certain nombre de témoignages de personnes traitées avec succès par la chiropractie. A ce sujet, il est renvoyé au dossier remis aux membres de la commission.
En ce qui concerne le risque d’accidents à l’occasion de manipulations chiropratiques, l’expert souligne que de tels accidents sont très rares, étant entendu que le chiropraticien doit en tout état de cause être couvert par une assurance professionnelle. Il reste que la prudence doit être de mise lors des manipulations et que le chiropraticien doit asseoir son traitement sur des examens préalables approfondis parmi lesquels il convient de citer en premier
lieu l’interprétation correcte des radiographies. Aussi le chiropraticien doit-il respecter des hypothèses où le traitement chiropratique est strictement contre-indiqué, notamment dans l’hypothèse d’un cancer.
En ce qui concerne la délimitation des compétences respectives du chiropraticien, du kinésithérapeute spécialisé, de l’ostéopathe et du spécialiste en thérapie manuelle, M. Louis Stephany souligne que la différenciation réside principalement dans le degré de formation académique. Seul le chiropraticien
et, à un degré moindre, les ostéopathes américains disposent d’une formation académique approfondie.
Il est dès lors dans l’intérêt primordial du patient que ces différents titres et professions soient légalement définis et protégés. M. Louis Stephany précise que la chiropractie est reconnue en Belgique et que les consultations chez un chiropraticien, même s’il est consulté directement par le patient sans prescription médicale, sont remboursées par la Sécurité sociale à raison de 10 euros par séance. Il n’existe toutefois pas encore de nomenclature des actes chiropratiques.
En guise de conclusion, M. Louis Stephany estime que dans le but d’asseoir la chiropractie sur des bases solides au Luxembourg, on pourrait dans un premier temps envisager un travail de recherche en science clinique concernant l’efficacité de la chiropractie ou examiner le rapport coût-efficacité dans un encadrement scientifique en étroite collaboration avec le personnel d’un hôpital.
Au cours de ses travaux, la commission a recueilli une prise de position catégoriquement opposée à la chiropractie, à savoir celle du Collège médical. Ce dernier considère qu’il s’agit d’une technique sans aucun fondement scientifique qui n’a jamais rapporté une quelconque preuve d’efficacité et qui, par
voie de conséquence, est à considérer comme pratique illégale, dangereuse et nuisible. Le Collège médical relève que la médecine dite classique ne devrait pas, pour ce qui est de certaines techniques et thérapies non conventionnelles ayant rapporté la preuve d’une certaine utilité, abandonner
le terrain à ceux qui les offrent dans une certaine zone grise et en l’absence de contrôle. Il serait souhaitable que les patients soient informés du fait que ces actes, méthodes ou techniques, notamment dans le domaine de la médecine manuelle, font de toute façon partie de l’éventail thérapeutique de la médecine classique.
Il faut saluer le fait que de nos jours, la médecine classique n’occupe plus une position aussi tranchée que dans le passé où elle avait tendance à rejeter en bloc tout ce qui ne rentrait pas directement dans la médecine conventionnelle